Chantier EOLE

EOLE : comment SNCF a relevé ce défi technique

L’achèvement de la 1re partie du prolongement du RER E vers l’Ouest est l’aboutissement de 8 ans de travaux conduits à 30 m sous terre par les équipes de SNCF Réseau. Retour sur cette prouesse technique en compagnie de Xavier Gruz, Directeur de projet EOLE - NExTEO.

La mise en service de la première partie d’EOLE, le prolongement du RER E vers l’Ouest de l’Île-de-France, et l’ouverture de trois nouvelles gares desservies par un tunnel de 8 km, où les trains circulent jusqu’à 120 km/h entre la gare Saint-Lazare et Nanterre, marquent la fin de 8 ans de travaux menés à 30 mètres de profondeur sous la capitale. À la clé pour les clients : moins de voyageurs sur les lignes A, B et D, une baisse de fréquentation de 12% de la gare Saint-Lazare, à terme, mais aussi des déplacements facilités grâce à ce RER E prolongé, désormais ligne la plus interconnectée de la région.

Quels sont les bénéfices majeurs du 1er prolongement d’EOLE ?

« Le plus grand projet souterrain au monde »

Des travaux en zone hyperdense, au cœur de la région capitale, extraction de plus d’un million de tonnes de déblais, porter avec des fondations provisoires le CNIT et ses plus de 60 000 tonnes pour construire  la gare de la Défense, « glisser » l’équivalent d’une Tour Montparnasse sous la Porte Maillot : Xavier Gruz, Directeur de projet EOLE - NExTEO, revient sur les principaux défis techniques relevés par SNCF Réseau, maître d’ouvrage de ce chantier désigné « meilleur projet souterrain au monde », en 2023, par l’Association internationale des tunnels et de l’espace souterrain (AITES).

En savoir plus sur le projet EOLE

  • 5 000

    personnes sur le chantier au plus fort des travaux

  • 1 Mt

    de déblais extraits par voie fluviale

  • 250 000

    camions évités pour le transport de déblais

Quels ont été les principaux enjeux techniques ?

Xavier Gruz : Nous avons dû relever deux principaux challenges. Le premier : parvenir à « glisser » des gares souterraines sous la Défense et la Porte Maillot, de très gros ouvrages sur des sites particulièrement occupés, aussi bien en surface qu’en sous-sol. Un ouvrage souterrain, creusé par notre tunnelier sous Paris, relie les deux gares. Il a fallu l’alimenter en matériaux de construction, notamment avec des voussoirs, ces gros anneaux en béton qui sont posés afin de créer la structure du tunnel. Sortir et évacuer les déblais, en limitant l’impact sur les habitants et en sécurité, a été le second défi.

Comment avez-vous procédé ?

X.G. : Nous avons construit une base sur la Seine, à Courbevoie, afin de pouvoir les évacuer par voie fluviale, évitant ainsi l’équivalent de 250 camions par jour. Le déblai était transporté dans de la boue injectée sous pression pour maintenir le terrain. Le mélange arrivait par d’énormes tuyaux jusqu’à notre usine avant d’être traité sur place. La boue utile repartait sur le chantier, tandis que les matériaux excavés du tunnel étaient évacués par barges.

Pour en revenir aux gares, comment avez-vous procédé à La Défense ?

X.G. : Trouver un passage pour bâtir une gare souterraine dans ce quartier occupé par de nombreux immeubles de grande hauteur, et où le sous-sol est occupé par des fondations profondes a été un premier travail. Le choix a été fait de construire, sous le CNIT, la gare de La Grande Arche. Un faisceau de voies dédiées à la maintenance nous permettait d’y faire passer le tracé de la ligne.

Comment avez-vous géré les bâtiments du CNIT ?

X.G. : La voûte abrite 11 étages de bâtiments représentant une charge de 60 000 tonnes. Nous les avons posés sur des fondations provisoires, durant les trois ans de travaux de construction de la gare, avant de venir les reposer, si je puis dire, sur les grands poteaux qui portent la dalle du CNIT, au-dessus de la gare achevée. Construire une gare de cette taille tout en maintenant l’exploitation des bâtiments impactés a été une opération d’une ampleur inédite pour SNCF Réseau, qui a assuré 100% de la maîtrise d’ouvrage de ce chantier.

Visite du chantier de la gare de La Défense

À la Porte Maillot, le challenge était tout autre…

X.G. : En effet, pour la gare de Neuilly-Porte Maillot, tout le défi résidait dans le fait de parvenir à construire notre gare à plus de 30 mètres de profondeur, dans un sous-sol déjà très occupé par d’autres infrastructures, exemple la ligne 1 du métro, sans les faire bouger. Nous avons ainsi réussi à implanter des quais de 225 mètres de long. C’est un peu comme si on avait fait entrer la Tour Montparnasse sous la Porte Maillot. En outre, pour offrir davantage de confort aux voyageurs, une verrière de 120 mètres de long a été construite en surface. Celle-ci permet d’amener la lumière naturelle jusque sur les quais de la gare.

Visite de la gare de la Porte Maillot en 3D

Outre la prouesse technique, ce RER est aussi un concentré de technologies…

X.G. : Nous allons progressivement déployer un nouveau système d’exploitation des trains. Baptisé NExTEO, il permet d’appliquer au RER des dispositifs de supervision qui fonctionnent aujourd’hui sur les métros automatiques. Grâce à la conduite assistée, le train sera capable d'accélérer et de freiner automatiquement, dans les 15 km de section centrale de la ligne E située entre Nanterre et Pantin. La régulation automatique permettra de rapprocher les trains et d’optimiser ainsi leur circulation dans le tunnel. Un conducteur restera évidemment présent à bord pour assurer la surveillance des voies et gérer les embarquements à quai. 

Le prolongement se poursuit à présent vers Mantes-La-Jolie, avec quelles contraintes ?

X.G. : Cette seconde phase de travaux nous conduit à devoir transformer le nœud ferroviaire de Mantes-La-Jolie tout en maintenant un niveau de circulation suffisant pour permettre aux voyageurs des lignes Transilien et TER Normandie de continuer à prendre leur train. Ces énormes travaux sont d’un niveau de complexité que nous avons rarement connu sur un réseau en exploitation : Ils consistent essentiellement à bouger les voies et les caténaires avec un niveau de sécurité suffisante pour que les circulations se poursuivent.

Ce chantier, c’est aussi celui du savoir-faire de SNCF Réseau ?

X.G. : Notre casquette de maître d’ouvrage sur l’infrastructure souterraine et les gares nous a conduit à coordonner les différents métiers de la société afin d’assembler les compétences. Nous sommes également allés chercher les talents à l’extérieur de l’entreprise. Ainsi, au plus fort du chantier, 5000 personnes étaient mobilisées, dont 250 collaborateurs de SNCF Réseau. On sait donc piloter la maîtrise d’ouvrage sur de très grandes opérations et contenir les délais, y compris en cas de circonstances extraordinaires, telle que la crise sanitaire que nous avons connue.