Les sciences cognitives
En mobilisant les sciences de la cognition, les chercheurs de la SNCF dessinent les mobilités de demain en prenant en compte les spécificités du comportement humain. Particularité de leurs expérimentations : elles n’ont que rarement lieu en laboratoire, mais le plus souvent dans le vif de l’action !
Une signalétique testée à Sausset-les-Pins
À l’été 2021, les voyageurs de la gare de Sausset-les-Pins, près de Marseille, ont participé sans le savoir à l’expérimentation grandeur nature d’une nouvelle signalétique de sécurité. De taille accrue, plus concise, présentant un lien entre les pictogrammes et les consignes de sécurité et un « air de famille » plus fort avec les panneaux de jalonnement présents. Essai validé : l’analyse des comportements et du regard des participants ont montré que cette signalétique attire plus l’attention et est mieux interprétée. Elle sera progressivement déployée sur tout le réseau.
Le Programme « Expérience & Cognition »
Analyser le vécu des clients et des salariés SNCF pour anticiper leurs besoins, évaluer les effets de l’arrivée de nouveaux services, produits ou technologies… Voici la mission du Programme « Expérience & Cognition » de la direction Technologies, Innovation et Projets Groupe.
Des disciplines multiples représentées
Cinq chercheurs et une dizaine de collaborateurs, spécialistes d’une multiplicité de disciplines permettant de rendre compte du fonctionnement de l’humain : psychologie cognitive, neurosciences, sémiotique, anthropologie, sociologie, psychoacoustique, design… « Nous embrassons à la fois ce qui relève des processus cognitifs et du comportement, de l’individuel et du collectif, des pratiques émergentes comme de celles acquises sur plusieurs années » explique Simone Morgagni, responsable de cette équipe de recherche.
Tester en conditions réelles…
Comme dans le cas de la gare de Sausset-les-Pins, les expériences ont souvent lieu en situation « écologique ». A savoir en milieu réel ou en reproduisant les caractéristiques essentielles, permettant donc de généraliser les résultats obtenus.
… ou utiliser la réalité virtuelle
Entre 2020 et 2021, l’équipe a œuvré à l’évaluation de nouveaux systèmes d’alerte pour la traversée des voies à niveau pour les piétons dans les toutes petites haltes, dépourvues de souterrains ou de passerelles. Impensable ici d’expérimenter en gare. Trop dangereux. L’équipe a donc fait le choix de modéliser une gare en 3D afin que les participants puissent l’arpenter librement dans une très grande salle, casque de réalité virtuelle vissé sur la tête, et y accomplir des activités comme s’ils étaient en gare.
Un nouveau système de sécurité
Ce travail a permis de valider la pertinence d’un système de sécurité renforcé et multisensoriel, plus complet que le pictogramme rouge clignotant actuellement utilisé. Dans l’attente de l’arrivée d’une nouvelle génération de systèmes de sécurité, dont la conception a été lancée depuis, ce système est en passe d’être déployé sur certaines gares.
Comment prendre la parole en cas de retard
Parfois simuler le réel est nécessaire. Comme pour les travaux sur la meilleure prise de parole en cas d’un retard rattrapable. Comment augmenter le taux de satisfaction des voyageurs d’un train retardé au départ mais arrivé à l’heure (taux inférieur de 10 % à un trajet sans retard au départ) ? Faut-il que le chef de bord ne dise rien ? Qu’il annonce que le retard sera sûrement comblé ? Qu’il donne une estimation des chances de le rattraper ? Les volontaires ont participé à un jeu vidéo simulant la situation, sans connaître l’objectif de l’expérience pour éviter tout biais.
Les travaux sur les transports de demain
En partenariat étroit avec les équipes Tech4Rail1 et Tech4Mobility2, les chercheurs du programme « Expérience & cognition » contribuent également à la conception des « train léger » et « train très léger » destinés à redynamiser dans les années à venir la mobilité dans les territoires.
Confort acoustique, aménagements à bord, services… Là encore, il s’agit de partir des besoins et des ressentis humains pour inventer les transports de demain.
Trois questions à Simone Morgagni
Travaillez-vous sur des produits déjà finis ?
Oui, nous pouvons à la fois accompagner un processus de conception issu d’une étude préalable de besoins et contribuer à comprendre les raisons pour lesquelles un produit n'a pas rencontré son public pour proposer des ajustements. Nous apportons un regard complémentaire : partir de l’analyse des usages pour identifier les améliorations à apporter ou identifier des meilleures technologies pour répondre au besoin. À partir d’une compréhension plus fine du besoin des clients ou des salariés, nous permettons donc à SNCF d’adapter ses processus ou son offre de manière plus fine.
Un exemple ?
Le confort acoustique à bord des trains. Au lieu de fixer un seuil physique à priori, nous avons fait le choix d’étudier en quoi le bruit peut être gênant ou non en fonction des activités pratiquées : lire un livre, regarder une série, travailler sur son ordinateur, faire une réunion de travail… Les résultats de nos expérimentations nous amènent à concevoir des outils permettant de spécifier les achats à venir jusqu’à repenser potentiellement les trains de demain en fonction de nouvelles activités que nous voudrions pouvoir proposer à nos voyageurs.
Quels aspects du travail des agents SNCF étudiez-vous ?
Notre capacité à construire des indicateurs à partir des comportements ou processus humains nous permet également d’intervenir sur les conditions de travail et l’expérience des salariés. Nous avons déjà accompagné différentes activités SNCF sur des thématiques aussi variées que l’amélioration et la sécurisation de la conduite ou l’impact des espaces de travail sur le confort, l’efficacité et la créativité des salariés.
Les sciences de la cognition nous apportent une approche rationnelle pour objectiver nos retours d’expériences. Elles permettent également de mener des simulations sans faire de travaux sur le réseau, ce qui réduit les coûts et les procédures.
Nos partenaires
- partenaires internes : TGV-Intercités, Transilien, SNCF Réseau, AREP, Centre d’Ingénierie du Matériel, SNCF Connect & Tech
- partenaires externes : Université Gustave Eiffel, CEA, TU Wien, Sorbonne Université, Université de Paris Cité, Ecole de Design Nantes Atlantique